vendredi 10 mai 2013

Stage de poterie du Rif


La forêt toute ouatée de brume joue la discrète ce matin. A l’entrée de Sore une tente rouge nous indique l’entrée de cette belle propriété où déjà tout est en place.
Autour d’un grand bac à sable, Aïcha dans une position improbable malaxe telle une pâte à pain, l’argile avec  la chamotte faite de terre crue et cuite passée au tamis, préalablement concassée par les petits lutins munis de leur marteaux.

Les proportions ?c’est au toucher, à l’œil comme disent les bonnes cuisinières, un peu d’eau, un peu  de chamotte et les pouces pénètrent énergiquement, rendant ce mélange souple et d’une couleur délicieusement chocolatée.
Tout le monde s’installe sur les tapis et la leçon commence :
Premier exercice, confectionner une assiette. Deux gros galets plats intercalés de sable lui servent de tournette. Aïcha distribue à chacun une belle boulette de terre.

C’est un peu comme en pâtisserie lorsqu’on veut foncer un moule à tarte avec une pâte molle et collante, on pousse la pâte vers les bords en s’assurant que le fond soit régulier et suffisamment épais.

Que l’on soit droitier ou gaucher  les deux mains participent.

Un gros boudin est posé, lissé, le résultat n’est pas toujours conforme au modèle mais Aïcha, soucieuse, rattrape les petits défauts, lissant avec un galet mouillé et  un morceau de peau de chèvre, les aspérités.

A midi, 12 assiettes sèchent au soleil alors que tout le monde se régale des plats aux couleurs appétissantes. Aïcha s’inquiète du travail fait ce matin ; elle déplace les assiettes et les met à l’ombre, pendant que nous terminons le repas sous le grand saule.

14h3O les activités reprennent, nous allons faire un Mejmar  (brasero petit modèle) Cette pièce qui  sert à brûler l’encens est une reproduction en modèle réduit du brasero servant à cuisiner et que nous ferons plus tard.

Tout débute par une boule  dans laquelle on introduit l’index pour former une sorte de bol, un colombin est posé , et à l’aide d’une planchette humidifiée, l’extérieur est lissé en partant de la base vers le haut, un peu comme on fait au tour de potier pour  donner une épaisseur régulière.  Trois boulettes posées sur les lèvres sont façonnées. S’il y a trop de terre on en enlève, s’il n’y en a pas assez on en rajoute. Toutes ces opérations se font avec de l’eau, rendant l’ensemble très mou,  difficile à travailler. Voilà, cette magnifique journée se termine, le bonheur était dans le pré.

Dimanche 05mai 2013
Ce matin il fait très beau, Deuxième étape faire un Mejmar « brasero »
(grand modèle). Même technique au départ, mais comme les bords sont plus hauts, la pose du colombin, qui est plutôt une plaque, va être différente et là, c’est à voir ……..
Aïcha forme un gros boudin  d’une vingtaine de centimètres, le place dans sa main gauche, et du tranchant de sa main droite forme un sillon profond. En cadence, la paume et le plat de sa main frappe la terre qui s’étale le long de son avant bras, formant une plaque d’une trentaine de cm sur vingt. Elle la place avec  aisance sur le fond ; elle en fera deux qui se rejoindront pour former d’un seul coup la hauteur total de la pièce. C’est une merveille !
Les trois supports sont posés, les trous percés, les anses mises et seulement ses mains, un galet, une planchette de bois. Son regard pétille, observe, elle aide chacun dans ses difficultés.

Muni d’un galet ou d’une petite cuillère, chacun polit les assiettes qui ont séchées mais qui restent fragiles.

C’est une étape importante qui donne cet aspect lisse et doux et qui nous procure détente, relaxation, un bienfait supérieur à tous les antidépresseurs et autres remèdes .
Bonne médecine stimulante pour le corps et l’esprit.
La décoration se fait à partir d’engobes préparés avec de l’oxyde de manganèse, oxyde de fer, pierre blanche, dilués et là, pas besoin de pinceaux. Aïcha prend quelques brins de poils de biquette et trace de belles arabesques et motifs tribaux difficiles à reproduire, chacun décore selon sa personnalité.

Ces deux jours furent extraordinaires  Petits et grands ont appris, partagés, ressentis, communiqués, pas forcement par la parole, Aïcha ne parle pas français,  Mohamed  son fils traduisait mais nous nous sommes compris au delà des mots.
Les poteries vont sécher tranquillement jusqu'à la tessonnade ou nous les cuirons le lundi 20 mai en début d'après midi.

Colette

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